Monténégro : Le dilemme entre droit à la vie privé et la santé
Les autorités de Monténégro ont décidé de privilégier le droit à la santé publique au droit à la vie privée.
Longtemps partagées entre ces deux positions, il n’a pas fallu trop longtemps pour qu’enfin, elles se décident de faire quelque chose d’extraordinaire qui ne sera pas vu de bon œil par tout le monde.
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En effet, ces dernières ont décidé de publier la liste des personnes qui seraient infectées ou potentiellement infectées par le virus du CoviD-19, ainsi que leur lieu de résidence. Ces listes vont mettre en évidence les personnes infectées en quarantaine et les personnes qui auraient pu avant avoir un contact avec elles ladite quarantaine. Cette liste constitue aujourd’hui 1% de la population, reparti selon les localités. L’idée est de permettre à toute personne d’identifier d’avance les individus qui refuseront de se maintenir en quarantaine et exposeraient de ce fait les autres. « Nous avons estimé que le droit à la santé et à la vie était au-dessus du droit à la protection inconditionnelle des données personnelles », expliquait le Premier ministre Dusko Markovic. « C’est pourquoi ce n’est pas le moment de faire des nuances juridiques, mais de sauver des vies. ».
La publication a été faite suite à l’obtention d’une autorisation de la part de l’autorité en charge de la protection des données personnelles de Monténégro. Cette mesure bien sûr a offusqué de plus d’un. Et les défenseurs de la protection des droits humains ont décidé d’intervenir. « Il n’y a pas de base juridique adéquate pour le traitement public des données de santé sur Internet parce qu’elles entrent dans une catégorie de données distincte et bénéficient d’un niveau de protection plus élevé », a voulu signifier la fondation SHARE, une fondation qui s’activent pour la promotion de droit numérique et les libertés individuelles au niveau de l’informatique. « L’objectif de cette mesure est également controversé. Est-ce la honte publique des personnes qui ont violé la quarantaine, ce qui peut être conclu des déclarations des fonctionnaires monténégrins, ou est-ce une mesure qui apportera des résultats concrets ? », s’interroge à cet effet la fondation.
Il est certain que ces mesures ont crée une scission au niveau de l’opinion publique monténégrine. De toutes les manières, le gouvernement s’expose si jamais suite à une vérification il s’avère que ces mesures sont contraires à la constitution. « Les proches du gouvernement prétendent que le facteur de condamnation publique fera hésiter les gens qui s’isolent avant de décider de violer la quarantaine », notait Luka Nikolic, politologue Monténégrin. « D’autre part, les militants des droits de l’homme et certains citoyens estiment qu’il est inacceptable et inefficace d’étiqueter publiquement des personnes qui n’ont commis aucun acte contraire à la loi. Mais lorsque la crise prendra fin, on évaluera si cette action a été utile ou non ».
Il faut noter d’une part que le Monténégro n’est pas le seul à avoir opté pour ce genre de mesure. En effet, son voisin la Bosnie-Herzégovine avait opté pour les mêmes mesures. « Nous sommes d’avis qu’il n’est pas illégal de publier un minimum de données sur les personnes qui violent la loi », affirmait l’Agence bosniaque pour la protection des données personnelles dans son communiqué. « Ils violent la loi de ceux qui se protègent et qui sauvent des vies. Par conséquent, l’intérêt public l’emporte sur le droit à la protection des données personnelles », avait noté les autorités bosniaques de leur côté.
La Fondation SHARE de son côté n’a pas manqué d’interpeller le gouvernement sur cette question qui est assez délicate : « Le gouvernement pourrait supprimer les données du site une fois que les citoyens sont guéris, mais cela ne peut être garanti pour le reste de l’Internet. De cette façon, les données pourraient rester publiques pour toujours ».
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